Lors de la création de son activité, un entrepreneur ne souhaitant pas constituer une société, entité distincte de la personne qui la crée, avait le choix entre deux modes d’exercices :
- Entrepreneur individuel classique ;
- Entrepreneur individuel à responsabilité individuel (EIRL).
La loi n°2022-172 du 14 février 2022 en faveur de l’activité professionnelle indépendante, publiée au Journal officiel le 15 février 2022, a consacré la création d’un statut unique protecteur pour l’entrepreneur individuel.
Cette consécration met fin à la possibilité de créer des EIRL.
I. La suppression du statut de l’EIRL
Contrairement au statut de l’entrepreneur individuel classique, l’option pour le statut d’EIRL, permettait la création d’un patrimoine d’affectation distinct du patrimoine personnel de l’entrepreneur. Donc sauf s’il a opté pour le statut d’EIRL, le patrimoine de l’entrepreneur individuel, était composé tant de biens personnels que de biens professionnels, et seule sa résidence principale était protégée.
Pour bénéficier de cette séparation des patrimoines, le dépôt d’une déclaration d’affectation, et d’un état descriptif, s’avéraient nécessaires.
Le statut d’EIRL, institué par la loi du 15 juin 2010, va progressivement disparaître. Cependant, ces principaux avantages sont repris dans le nouveau statut.
II. Les nouvelles dispositions de l’entreprise individuelle
Précisons que le nouveau statut consacré par la loi du 14 février 2022, s’appliquera automatiquement, aux commerçants, artisans, agriculteurs, et professions libérales, n’exerçant pas en société. Ce statut est donc applicable de droit sans formalités particulières, entrainant une distinction automatique des patrimoines.
De nouvelles dispositions sont insérées dans le titre II du livre V du Code de commerce, désormais intitulé « De la protection de l’entrepreneur individuel » (C. com. art. L 526-22 à L 526-26 nouveaux). Les textes réglementaires complétant la loi sont adoptés progressivement.
A. La notion de biens utiles
Le nouvel article L526-22 alinéa 2 du Code de commerce dispose que « les biens, droits, obligations et sûretés dont il est titulaire et qui sont utiles à son activité ou à ses activités professionnelles indépendantes constituent le patrimoine professionnel de l’entrepreneur individuel. […] Les éléments du patrimoine de l’entrepreneur individuel non compris dans le patrimoine professionnel constituent son patrimoine personnel ».
Cela dit, comment déterminer les biens utiles à l’activité professionnelle indépendante ? Le décret n° 2022-725 du 28 avril 2022, donne des indications sur la composition du patrimoine professionnel (sans constituer une liste exhaustive). Il donne lieu à la création du nouvel article R526-26 dans le Code de commerce. Les biens, droits, obligations et sûretés dont l’entrepreneur individuel est titulaire, utiles à l’activité professionnelle, sont tels que :
- Le fonds de commerce, fonds artisanal, fonds agricole, ou tout autre fonds (patientèle…),
- Les biens meubles (marchandises, matériels, outillages, moyens de mobilité…),
- Les biens immeubles utilisés pour l’activité y compris le local professionnel s’il se trouve dans la résidence principale,
- Les biens incorporels (droits de propriété intellectuelle, données clients, brevets, licences, marques…),
- Les fonds de caisse : disponibilités présentes en caisse et sur les comptes bancaires dédiés à l’activité.
Cependant cette notion pourrait être source de difficultés en pratique, notamment s’agissant des biens mixtes, comme un véhicule utilisé à des fins personnelles et professionnelles.
B. Les nouvelles et anciennes dettes
Le nouveau statut est applicable :
- A l’entreprise individuelle déjà créée pour les créances nées à compter du 15 mai 2022 ;
- A toute nouvelle entreprise individuelle crée à compter du 15 mai 2022.
C. Compte bancaire
Lorsqu’il déclare un patrimoine affecté, l’entrepreneur individuel ayant opté pour l’EIRL, avait l’obligation d’ouvrir un compte bancaire dans un établissement de crédit.
La loi nouvelle ne fait pas obligation à l’entrepreneur individuel d’ouvrir un compte bancaire séparé pour l’exercice de son activité. L’obligation faite à tout commerçant de se faire ouvrir un compte bancaire continuera de s’appliquer également (C. com. art. L 124-24).
Même quand il ne sera pas soumis à l’une de ces obligations, l’entrepreneur individuel aura tout intérêt à ouvrir un compte bancaire séparé pour son activité professionnelle, notamment au regard de la charge de la preuve qui lui incombera en cas de contestation sur la composition des patrimoines.