Distinction entre la location meublée et la sous location meublée en SCI

Barre

Partager cet article

Location meublée et sous-location meublée en SCI : deux formes de mise à disposition d’un bien immobilier meublé.

Pour rappel, la société civile immobilière (SCI) désigne une forme juridique présentant des avantages dans le cadre de la détention d’un patrimoine immobilier. En effet, elle permet d’éviter l’application du régime défavorable de l’indivision, et facilite la transmission des biens immobiliers.

La SCI est une société civile, ce qui signifie que son objet social doit être exclusivement civil et ne peut en aucun cas être commercial. De ce fait, elle est, par défaut, soumise au régime fiscal de l’impôt sur le revenu.

Au regard des caractéristiques présentées, il convient nécessairement de préciser que donner un bien en location meublée via une SCI comporte des risques dans la mesure ou l’administration fiscale peut assujettir la société à l’impôt sur les sociétés.

L’activité de « location de meubles » étant assimilée à des actes de commerce (article L110-1 4° du Code de commerce), la location meublée constitue donc une activité de nature commerciale et non civile. Bien que l’exercice d’une activité commerciale par une SCI n’entraîne pas la nullité du contrat de société, cela peut entraîner d’importantes conséquences en matière fiscale.

I. Cas n°1 : l’exercice d’une activité de location meublée et la SCI

A. Conservation de la transparence fiscale de la SCI

En principe, l’exercice d’une activité de location meublée par la SCI la rend commerciale, et cela en raison de son objet social. Toutefois, cette règle comporte deux exceptions, permettant à la SCI de conserver sa transparence fiscale.

– Lorsque le montant hors taxes des recettes issues de l’activité de location meublée de la SCI n’excède pas 10 % du montant total de ses recettes hors taxes. De plus, un franchissement exceptionnel du seuil des 10 % peut être toléré, tant que la moyenne des recettes hors taxes de l’année en cours et des 3 années précédentes n’excède pas ce seuil des 10 %.

– Lorsque le caractère habituel de la location meublée n’est pas caractérisé, supposant que la location meublée demeure une activité exceptionnelle, de courte durée et ne doit pas se renouveler sur plusieurs années.

Dans cette configuration, le régime d’imposition de la SCI demeure à l’impôt sur le revenu et la location meublée a un caractère accessoire.

B. Assujettissement de la SCI à l’Impôt sur les sociétés (IS)

Selon l’article 206 2° du Code général des impôts (CGI), les sociétés civiles qui se livrent à une exploitation ou à des opérations présentant un caractère industriel ou commercial au sens des articles 34 et 35 du CGI doivent être assujetties à l’impôt sur les sociétés. Le taux réduit de l’IS de 15 % s’applique jusqu’à 42 500 euros de résultat et au-delà, le taux d’imposition est de 25 %.

Il en découle qu’une SCI peut exercer l’activité de location meublée si elle opte pour son imposition à l’IS. Dans cette hypothèse, l’administration fiscale n’opère pas de distinction entre les revenus issus de l’activité civile (location d’un bien non meublé) et ceux provenant d’une activité commerciale (location d’un bien meublé).

Rappelons que cette option irrévocable, rend nécessaire la tenue d’une comptabilité en partie double, et l’établissement des comptes annuels.

L’assujettissement à l’IS permettra de pratiquer des amortissements visant à prendre en compte la dépréciation du bien immobilier liée à son usure normale, et de déduire certaines charges fiscales de ses recettes.

 

II. Cas n°2 : l’exercice d’une activité de sous location meublée et la SCI

Par un arrêt du 31 mars 2023 (CAA de Marseille, 2ème chambre, 31 mars 2023, n°21MA00318), la Cour administrative d’appel, s’est prononcée dans le cadre d’une affaire ou une SCI donnait en location nue à des associés minoritaires un bien immobilier à usage d’habitation. Les associés locataires sous louaient ce même bien en meublé, sur de courtes durées. Ils déclaraient et payaient l’impôt sur ces revenus tirés de la sous location meublée.

De ce fait, l’administration fiscale a considéré que les recettes tirées de la location étaient passibles de l’IS compte tenu du caractère habituel de l’exploitation commerciale de ce bien, estimant que la SCI louait elle-même le bien en meublé dont elle est propriétaire par le biais d’annonces de locations immobilières.

Toutefois, selon les juges :

– il ne résulte pas de l’instruction que la SCI a elle-même procédé aux actes de publicité ni même perçu les sommes issues de la location de l’immeuble ;

– il résulte des termes du bail que l’immeuble a été donné en location à l’état nu aux associés, donc non meublé ;

– les locataires eux même ont garni le bien de meubles et ils ont immédiatement déclaré les revenus tirés de ces locations comme des revenus passibles de l’impôt sur le revenu ;

– l’absence de clause autorisant la sous location est sans influence sur la détermination de la personne ayant encaissée les sommes issues des locations de l’immeuble.

Dans ces conditions, la SCI est fondée à soutenir qu’elle ne pouvait être regardée comme exerçant une activité commerciale au sens de l’article 34 du CGI et, par suite, qu’elle n’était pas redevable de l’IS. Il en découle que la Cour d’appel distingue et traite isolément la location nue de la sous-location meublée. En appliquant cette distinction, le régime d’imposition de la SCI n’a pas été remis en cause quand bien
même une sous location en meublée est effectuée.

Précisons que les loyers issus de la sous location meublée ont le caractère de revenus commerciaux et sont donc imposés dans la catégorie des bénéfices industriels et commerciaux (BOI-RFPI-CHAMP-10-30 §80, 05/04/2017). Les loyers tirés de la sous-location d’un logement nu, ne se rattachant à aucune catégorie, sont soumis à l’impôt sur le revenu, au titre des bénéfices non commerciaux (article 92 du CGI).

L’abus de droit peut être caractérisé dans le cadre de cette opération, en application des dispositions des articles L.64 et L.64 A du Livre des procédures fiscales (LPF) si l’administration fiscale démontre que le montage en question a un motif exclusivement fiscal ou un but principalement fiscal.

À lire aussi