Conséquences fiscales de la mise en location gérance d’un fonds de commerce

Barre

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Nommée dans la pratique « gérance libre », la location gérance désigne une convention par laquelle le propriétaire d’un fonds de commerce (ou artisanal) en concède la location à un locataire gérant qui l’exploite à ses risques et péril, moyennant le paiement d’une redevance.

A l’égard du bailleur, cette technique permet de conserver la propriété de son fonds, d’en maintenir l’exploitation et de s’assurer un revenu grâce à la perception des redevances. Aussi, le propriétaire du fonds de commerce pourra tester les capacités et les compétences techniques du locataire gérant, en vue d’une éventuelle cession du fonds. Elle peut donc être utilisée à titre de mesure préparatoire à la cession du
fonds.

A l’égard du locataire gérant, l’opération permettra d’apprécier la viabilité de l’activité, sans avoir à investir immédiatement dans l’acquisition des éléments onéreux composant le fonds de commerce (clientèle, droit au bail, matériels, licences …).

Sur le plan fiscal, il convient de rappeler que l’opération n’entraîne pas l’imposition des plus-values affectant les éléments d’actif, ni l’imposition immédiate des bénéfices réalisés jusqu’au jour de la mise en location gérance. En effet, l’opération est analysée en un changement dans le mode d’exploitation. Toutefois, ce type de contrat implique des changements majeurs au regard de la situation fiscale du propriétaire du fonds de commerce.

I. Imposition des redevances perçues par le propriétaire du fonds de commerce

Bien que les redevances représentent des charges déductibles à l’égard du locataire gérant, les revenus que le bailleur tire de la location gérance de son fonds constituent des bénéfices d’exploitation taxables dans les conditions de droit commun.

A ce titre :

– Si le bailleur est une personne physique soumise à l’impôt sur le revenu : les redevances constituent des bénéfices d’exploitation imposables dans la catégorie des bénéfices industriels et commerciaux (BIC).

– Si le bailleur est une entreprise individuelle ayant opté pour son assimilation à une EURL ou une société soumise à l’impôt sur les sociétés (IS) : les redevances relèvent assurément de l’IS.

Dans la mesure ou l’activité exercée, ne présente pas un caractère professionnel, les déficits éventuels, ne peuvent être imputés sur le revenu global. En effet, les déficits des activités industrielles et commerciales exercées à titre non professionnel sont imputables sur les bénéfices réalisés dans le cadre de cette même activité ou des autres activités exercées à titre non professionnel (BOI-BIC-DEF-20-10 § 20) Toutefois, ils sont imputables sur les revenus de même nature sur les six années suivantes.

II. Assujettissement des redevances perçues à la TVA

Les redevances issues de la location gérance sont soumises à la TVA et au taux de 20%. En principe, la TVA doit être calculée sur le montant total des sommes auxquelles le bailleur peut obtenir en vertu du contrat de location. A ce titre, si le locataire gérant paie le loyer du local dans lequel il exploite le fonds, directement au propriétaire de l’immeuble, le montant de ce loyer doit s’ajouter à la redevance effectivement perçue par le bailleur du fonds, pour le calcul de la TVA.

III. Conséquences fiscales en matière de CET

Pour rappel, la contribution économique territoriale (CET) est composée de la cotisation foncière des entreprises (CFE) et la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises (CVAE). Le propriétaire d’un fonds de commerce donné en location-gérance est considéré comme poursuivant son activité professionnelle antérieure et est donc soumis à la CFE pendant la période de location gérance (CE 9-3-2016 n° 374893). Cela signifie qu’il doit continuer à payer la CFE même s’il n’exploite plus directement le fonds de commerce.

Cependant, compte tenu des modalités particulières de calcul de cette cotisation, il n’est redevable, en principe, que de la cotisation forfaitaire minimum, selon les dispositions de l’article 1647 D du Code général des impôts (CGI). En matière de CVAE, du fait des seuils d’imposition en vigueur, le bailleur échappe également, sous réserve que le montant annuel des redevances perçues soit supérieur à 500 000 euros.

 

IV. Cas de la cession du fonds à l’expiration de la location gérance

Dans l’hypothèse où le locataire décide de racheter le fonds suite à la location-gérance, le régime de droit commun inhérent aux cessions d’activités s’applique en principe. Toutefois, il existe des dispositifs d’exonérations.

En vertu de l’article 238 quindecies du CGI, la cession peut bénéficier de l’exonération totale ou partielle des plus-values, si la valeur du fonds transmis n’excède pas un certain montant. Si la valeur du fonds n’excède pas 500 000 euros l’exonération totale s’applique, et si elle n’excède pas 1 000 000 d’euros une exonération partielle est prévue. L’activité doit avoir été exercée pendant au moins cinq ans avant la mise en location-gérance du fonds. Sous réserve du respect de certaines conditions, il en est ainsi, même si le fonds est cédé à une personne autre que le locataire gérant.

Dans l’hypothèse où le bailleur cède le fonds donné en location-gérance à l’occasion de son départ à la retraite, il peut, à certaines conditions, bénéficier de l’exonération totale de l’article 151 septies A du CGI. À la différence du régime de l’article 238 quindecies, cette exonération s’applique indépendamment de la valeur du fonds. Les deux régimes peuvent être cumulés.

Toutefois, l’exonération prévue par l’article 151 septies du CGI réservée aux activités exercées à titre professionnel, est exclue (CE 29-7-2020 n° 438485). Pour conclure : location gérance d’un fonds de commerce constitue un mode opératoire intéressant en vue d’une transmission, mais comporte des aspects contraignants.

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