Introduit en France en 2007, et codifié aux articles 2011 et suivants du Code civil le mécanisme de la fiducie est une institution présentant des similitudes avec le trust anglo-saxon.
Sa principale efficacité repose sur le transfert de propriété des actifs, qui s’opère dès l’établissement du contrat de fiducie. En effet, la fiducie est une convention par laquelle un constituant transfère tout ou partie de ses biens ou droits à un fiduciaire.
Ce dernier se charge d’agir dans un but déterminé au profit d’un ou plusieurs bénéficiaires. A l’origine, sa portée était réservée aux constituants personnes morales. Toutefois, elle a été élargie avec l’admission des personnes physiques.
Bien que méconnue en France en raison de sa complexité et l’existence d’autres mécanismes plus optimisant en matière fiscale, la fiducie est utilisée comme un instrument pouvant s’insérer dans une stratégie globale de gestion et d’administration de patrimoine. Son utilisation à des fins de libéralité est expressément exclue.
Sur le plan fiscal, la fiducie est caractérisée par un régime de neutralité. En principe, le transfert de biens du patrimoine du constituant vers le patrimoine fiduciaire, ne génère aucune imposition.
I. Principes et fonctionnement du mécanisme de la fiducie
A. Parties établissant le contrat de fiducie
Le contrat doit être passé par écrit, entre un ou plusieurs constituants et un ou plusieurs fiduciaires ; étant que précisé que le ou les bénéficiaires ne sont pas parties au contrat.
– Le ou les constituants : toute personne physique ou morale a la possibilité de constituer une fiducie ;
– Le ou les fiduciaires : il peut s’agir des établissements de crédit, des entreprises d’investissement, des entreprises d’assurance ou des avocats ;
– Le ou les bénéficiaires : il peut s’agir de toutes personnes physiques ou morales, résidentes ou non résidentes de France. Le constituant ou le fiduciaire peut être le bénéficiaire ou l’un des bénéficiaires de la convention de fiducie.
Le constituant et le fiduciaire doivent être résidents d’un État de l’Union européenne ou d’un État ou territoire ayant conclu avec la France une convention fiscale en vue d’éliminer les doubles impositions et qui contient une clause d’assistance administrative en vue de lutter contre la fraude ou l’évasion fiscales.
B. Création d’un patrimoine fiduciaire et obligations du fiduciaire
Les biens ou droits transférés par le constituant au fiduciaire doivent former un patrimoine séparé, c’est-à-dire distinct du patrimoine personnel du fiduciaire. Il est prévu que les éléments d’actif, de passif transférés, et les opérations affectant ce patrimoine doivent faire l’objet d’une comptabilité autonome chez le fiduciaire. A ce titre, des comptes annuels doivent être établis.
Il en découle de ce principe que l’ouverture d’une collective à l’égard du fiduciaire n’affecte pas le patrimoine fiduciaire. En principe, ce dernier ne peut être saisi que par les titulaires de créances nées dans le cadre de la conservation ou de la gestion du patrimoine fiduciaire.
Cependant, en cas d’insuffisance du patrimoine fiduciaire, le patrimoine du constituant constitue le gage commun de ces créanciers, sauf stipulation contraire du contrat de fiducie mettant tout ou partie du passif à la charge du fiduciaire.
Quant aux obligations du fiduciaire, son obligation principale relève de la gestion et de la protection des biens confiés. A ce titre, il doit agir dans l’intérêt des bénéficiaires. Bien qu’il ne dispose pas d’un droit de propriété sur les biens gérés, il dispose d’un pouvoir d’administration.
Le constituant peut par ailleurs désigner un tiers chargé de la bonne exécution de la mission du fiduciaire mais le contrat de fiducie peut le lui interdire.
II. Fiscalité applicable à la fiducie : caractérisation d’un régime de neutralité.
A. Cas n°1 : le constituant est une personne morale
Concernant la constitution de la fiducie : si le constituant est désigné comme le ou l’un des bénéficiaires du contrat de fiducie, les profits ou les pertes ainsi que les plus ou moins-values résultant du transfert dans un patrimoine fiduciaire de biens et droits
inscrits à l’actif du bilan du constituant de la fiducie ne sont pas compris dans le résultat imposable de l’exercice de transfert sous réserve que certaines conditions soient respectées.
L’imposition des résultats du patrimoine fiduciaire est faite au nom du ou des constituants, considérés comme titulaires d’une créance au titre de la fiducie. Toute variation ou dépréciation du montant de cette créance au titre de la fiducie est sans incidence sur le résultat imposable du titulaire de cette créance. Les régimes des sociétés mères et de l’intégration fiscale sont applicables aux titres
de participation transférés à une fiducie. En matière de TVA et d’impôts locaux, le principe applicable est celui de l’imposition du fiduciaire.
B. Cas n°2 : le constituant est une personne physique
Dans cette configuration, il convient de distinguer deux hypothèses :
– La fiducie est constituée dans le cadre d’une activité de nature professionnelle : la création et les modalités d’imposition du résultat fiduciaire sont soumises, sous réserve de quelques adaptations, au régime fiscal applicable au constituant personne morale soumis à l’impôt sur les sociétés susmentionné.
– La fiducie est constituée dans le cadre de la gestion du patrimoine privé : la création ne peut donner lieu à une imposition de la plus-value au titre de l’impôt sur le revenu, sous réserve que le constituant soit le ou l’un des bénéficiaires désignés et que le fiduciaire inscrive, dans les écritures du patrimoine fiduciaire, les biens ou droits transférés pour leur prix ou valeur d’acquisition par le constituant.
Le résultat du patrimoine fiduciaire est quant à lui imposé à l’impôt sur le revenu directement au nom du constituant en fonction de la nature de l’activité de la fiducie. La fiducie pouvant être constituée pour diverses raisons, elle devient un instrument clé qui sera incontournable dans les opérations à venir.