Dans le cadre de leur coopération économique et fiscale, la France et l’Allemagne ont signé deux conventions à Paris ( convention franco-allemande ), l’une le 21 juillet 1959 et l’autre le 12 octobre 2006.
Elles visent à établir des règles claires et équitables permettant de déterminer quel Etat a le droit d’imposer certains biens et revenus, tout en évitant la double imposition.
C’est ainsi que ces accords abordent les questions importantes concernant la fiscalité des biens mobiliers et immobiliers détenus par les résidents des deux pays.
1. L’imposition des revenus immobiliers
a. Le champ d’application de la convention Franco-allemande
Les deux conventions fiscales franco-allemande prévoient des règles relatives à leur application.
A ce titre, l’article 1 de l’accord du 21 juillet 1959 précise que son champ d’application s’étend :
- Aux successions de personnes domiciliées en France ou en Allemagne au moment de leur décès ;
- Ainsi qu’aux dons effectués par des personnes ayant pour domicile l’un des deux pays lors de la donation.
L’article 2 (convention du 12 octobre 2006) aborde la définition des impôts concernés, à savoir les impôts sur les successions et les dons en Allemagne, mais également les droits de mutation à titre gratuit en France. Enfin, l’article 4 de cette deuxième convention, sur la détermination de la résidence fiscale.
b. La définition de la notion de biens immobiliers
Tel que spécifié dans la convention fiscale franco-américaine, le traité entre la France et Allemagne énonce que l’expression « biens immobiliers » prend le sens que lui attribue le droit de l’Etat contractant où les biens considérés sont situés.
En revanche, selon l’article 5 §2 de la convention de 2006, « les créances garanties par hypothèque ou autrement sur un immeuble ne sont pas considérées comme des biens immobiliers ». Sont considérés comme biens immobiliers :
- Le cheptel mort ou vif des exploitations agricoles et forestières ;
- Les droits auxquels s’appliquent les dispositions du droit privé concernant la propriété foncière ;
- L’usufruit des biens immobiliers ;
- Les droits à des paiements variables ou fixes pour l’exploitation ou la concession de l’exploitation de gisements minéraux, les sources et les autres ressources naturelles ;
- Les actions, parts ou autres droits détenus dans une société ou personne morale dont la majorité de l’actif est constituée, directement ou indirectement, par l’intermédiaire d’une ou plusieurs autres sociétés ou personnes morales, d’immeubles situés dans un État contractant ou de droits relatifs à de tels biens.
Les navires, bateaux et aéronefs, les immeubles affectés par une société ou personne morale (telle que désignée au sens du §3) à sa propre exploitation industrielle, commerciale, agricole ou forestière ou à l’exercice par elle d’une profession libérale ou d’autres activités de caractère indépendant ne sont pas considérés comme des biens immobiliers au sens de la convention fiscale franco-allemande.
En outre, l’application du paragraphe 1 ( convention de 2006) fait constater qu’un immeuble fait partie de la succession ou de la donation d’une personne domiciliée dans un État contractant lorsqu’il est possédé par des sociétés ou personnes morales dont le défunt ou le donateur, seul ou conjointement avec son conjoint, leurs ascendants ou descendants ou leurs frères et sœurs, possède plus de la moitié des actions, parts ou autres droits, directement ou par l’interposition d’une ou plusieurs autres sociétés ou personnes morales.
Les dispositions du présent article s’appliquent aussi bien aux biens immobiliers d’une entreprise et qu’aux biens immobiliers utilisés pour l’exercice d’une profession libérale ou d’autres activités de caractère indépendant.
2. Présentation des biens mobiliers
Les biens mobiliers d’une entreprise faisant partie de la succession ou d’une donation d’une personne domiciliée dans un État contractant, et appartenant à un établissement stable situé dans l’autre État contractant, sont imposables dans cet autre État (article 6 de la convention franco-allemande du 12 octobre 2006 ).
Selon la convention franco allemande, un « établissement stable » désigne une installation fixe d’affaires par le biais de laquelle une entreprise exerce tout ou partie de son activité.
Un « établissement stable » comprend notamment :
- Un siège de direction ;
- Une succursale ;
- Un bureau ;
- Une usine ;
- Un atelier ;
- Une mine ;
- Un puits de pétrole ou de gaz ;
- Tout lieu d’extraction de ressources naturelles ;
- Un chantier de construction ou de montage uniquement s’il dure plus de douze mois.
Malgré les dispositions énoncées précédemment, il est considéré qu’il n’existe pas d’établissement stable :
- Si les installations sont utilisées uniquement à des fins de stockage, d’exposition ou de livraison de marchandises appartenant à l’entreprise ;
- Si des marchandises appartenant à l’entreprise sont entreposées uniquement à des fins de stockage, d’exposition ou de livraison ;
- Si des marchandises appartenant à l’entreprise sont entreposées uniquement à des fins de transformation par une autre entreprise ;
- Si une installation fixe d’affaires est utilisée uniquement à des fins d’achat de marchandises ou de collecte d’informations pour l’entreprise ;
- Si une installation fixe d’affaires est utilisée uniquement à des fins d’exercice d’autres activités préparatoires ou auxiliaires pour l’entreprise ;
- Ou si une installation fixe d’affaires est utilisée uniquement à des fins d’exercice cumulé d’activités mentionnées précédemment, à condition que l’activité globale de l’installation fixe d’affaires résultant de ce cumul reste préparatoire ou auxiliaire.
Les biens mobiliers faisant partie de la succession ou d’une donation d’une personne domiciliée dans un État contractant et utilisés pour l’exercice d’une profession libérale ou d’autres activités indépendantes, et appartenant à une base fixe située dans l’autre État contractant, sont imposables dans cet autre État.
Par ailleurs, selon le Protocole relatif à la Convention entre la République française et la République fédérale d’Allemagne en vue d’éviter les doubles impositions en matière d’impôts sur les successions et sur les donations de 2006, l’article 8 établit que les biens mobiliers corporels sont soumis à l’imposition dans l’État où ils sont situés. Cette exception au principe de taxation liée à la résidence des biens meubles est modérée par le point 4 de ce protocole), qui précise que la monnaie en espèces, les créances de toutes sortes, les actions et les parts sociales ne sont pas considérés comme des biens mobiliers corporels. De plus, seuls les biens meubles corporels intentionnellement situés sur le territoire de l’un des deux Etats peuvent y être imposés. Dans le cas contraire, l’article 9 de la convention s’applique et établit le principe de taxation basé sur la résidence des biens.
3. La taxation des revenus de capitaux mobiliers
La convention fiscale franco-allemande établit les règles concernant la taxation des dividendes entre les deux pays.
Selon l’article 9 de la convention de 1959, les dividendes versés par une société résidente d’un Etat contractant à un résident de l’autre Etat contractant sont imposables dans cet autre Etat.
De plus, chaque Etat contractant a le droit de prélever un impôt sur les dividendes par voie de retenue à la source, conformément à sa législation. Cependant, ce prélèvement ne peut dépasser 15% du montant brut des dividendes.
En outre, les dividendes payés par une société de capitaux résidente de France à une société de capitaux résidente de la République fédérale allemande, détenant au moins 10% du capital social de la première société, ne peuvent pas être imposés en France.
L’article 9 (convention de 1959) précise également qu’un résident de la République fédérale qui reçoit des dividendes d’une société résidente de France peut obtenir le remboursement du précompte sur ces dividendes, dans la mesure où il a été effectivement payé par la société. Le montant brut du précompte remboursé est alors considéré comme un dividende pour l’application de la convention.
Par dérogation au paragraphe 2 de cette même convention, lorsque les dividendes sont payés par une société de capitaux résidente de la République fédérale allemande à une société de capitaux résidente de France, détenant au moins 10% du capital de la première société, l’impôt prélevé à la source dans la République fédérale ne peut dépasser 10% du montant brut des dividendes jusqu’au 31 décembre 1991, puis 5% à partir du 1er janvier 1992.
Rappelons par ailleurs que la notion de « dividendes » désigne les revenus provenant d’actions, d’actions ou droits de jouissance, de parts de mine, de parts de fondateur ou d’autres parts bénéficiaires, à l’exception des créances.
Les revenus soumis au régime des distributions par la législation fiscale de l’État contractant, dont la société distributrice est résidente, sont également considérés comme des dividendes de même que:
- Les revenus qu’un « stiller Gesellschafter » tire de sa participation en tant que tel ;
- Et les revenus provenant de « partiarische Darlehen« , de « Gewinnobligationen » et les rémunérations similaires liées aux bénéfices, ainsi que les distributions liées à des parts dans un fonds d’investissement.
Il est également important de noter que les revenus provenant de droits ou parts bénéficiaires participant aux bénéfices, déductibles pour la détermination des bénéfices du débiteur, sont imposables dans l’État contractant d’où ils proviennent, selon la législation de cet État.
En revanche, les paragraphes 1 à 5 (article 9 de la convention de 1959) ne s’appliquent pas lorsque le bénéficiaire des dividendes possède un établissement stable dans l’autre État contractant et que les participations font partie de l’actif de cet établissement.
Conclusion
La signature de cette convention témoigne de la volonté de l’Allemagne et de la France, de renforcer leur coopération dans le domaine fiscal et de favoriser un environnement propice aux échanges économiques bilatéraux.