Le monde des affaires étant en constante évolution, il est primordial pour les sociétés de s’adapter et de chercher à s’imposer sur les marchés nationaux et internationaux afin d’assurer leur prospérité en adoptant différentes stratégies de développement.
Lorsqu’une société décide d’étendre son activité ou de lancer une nouvelle activité, deux choix s’offrent à elle : elle peut alors conserver son unité juridique en décidant de créer une succursale ou bien, elle peut envisager la constitution d’une nouvelle société communément appelée filiale qui disposera d’une autonomie juridique. Le choix de la structure juridique d’une entreprise est essentiel, ce dernier entraînant des répercussions sur la gestion future.
De ce fait, il est intéressant de se demander quels sont les principaux facteurs à prendre en compte pour déterminer s’il est préférable de choisir une filiale ou une succursale.
Nous analyserons tout d’abord ces deux entités à travers leur définition. Puis, nous ferons un comparatif de leurs avantages et inconvénients
- Deux entités juridiquement distinctes
Au regard du droit commercial et plus précisément selon l’article L. 233-1 du Code de commerce, « Lorsqu’une société possède plus de la moitié du capital d’une autre société, la seconde est considérée, pour l’application (Ord. n o 2015-900 du 23 juill. 2015, art. 2-2o) « des sections 2 et 4 du présent chapitre, comme filiale de la première. — [L. no 66-537 du 24 juill. 1966, art. 354.] » De ce fait, une filiale tirera son existence du rachat de titres d’une société préexistante par la société mère ou de la création d’une nouvelle société à travers laquelle la société mère sera associée ou actionnaire majoritaire. Une filiale intervient donc dans une logique de groupe de sociétés.
A l’inverse, il n’existe pas de définition légale concernant la succursale mais une définition règlementaire présente à l’article R. 123-40 du Code de Commerce : « Est un établissement secondaire au sens de la présente section tout établissement permanent, distinct du siège social ou de l’établissement principal et dirigé par la personne tenue à l’immatriculation, un préposé ou une personne ayant le pouvoir de lier des rapports juridiques avec les tiers. Une succursale dispose de locaux, d’un personnel qui lui est propre distinct de ceux intervenant auprès de la société mère et d’un salarié à la tête de celle-ci ayant pour mission de traiter avec les tiers ».
L’utilisation du mot « société » à travers l’article L233-1 lorsque le terme « filiale » est défini suppose instinctivement qu’une filiale est une réelle entreprise distincte et autonome (1) de l’entreprise dite mère contrairement à une succursale qui elle n’est qu’une émanation de l’entreprise première. Une filiale a donc ses propres statuts, son conseil d’administration, sa comptabilité et sa gestion mais surtout une personnalité juridique distincte de celle de la société mère contrairement à une succursale qui elle ne détient pas de personnalité juridique.
Ces propos destinés à définir ce que sont une filiale et une succursale peuvent toutefois être commentés. En effet, lorsque l’on parle d’une société filiale autonome de la société mère cette autonomie ne peut-elle être atténuée par la participation détenue par la société mère et donc par le contrôle que cette dernière peut avoir sur sa société fille ? En effet, une société mère détient souvent la majorité voire la totalité dans certains cas des titres de sa fille. C’est alors pour cela que la jurisprudence exige que l’intérêt sociale de la filiale soit préservé. Par exemple, il a notamment déjà été décidé qu’une avance de trésorerie d’une filiale à sa mère quand bien même cette avance aurait indirectement bénéficié aux autres filiales du groupe avec lesquelles la filiale prêteuse entretient des relations commerciales, n’était pas considérée comme consentie dans l’intérêt propre de la filiale (2). Nombreuses sont alors les jurisprudences venant préserver cet intérêt propre, bien qu’il serait intéressant sur le plan de la réflexion de se demander si l’existence même d’une filiale n’est pas motivée par un intérêt économique favorable à la société mère.
Maintenant que ces deux termes ont été définis, il serait alors intéressant de se demander quel choix semble judicieux.
B. Comparaison des avantages et inconvénients entre filiale et succursale
Etant une société distincte de la société mère, lors de la création d’une filiale dans le même pays, prenons l’exemple de la France, le même formalisme devra être respecté. En effet, il faudra alors rédiger les statuts de la société, choisir une dénomination qui lui est propre, déposer le capital social (3), publier les annonces légales dans un journal d’annonces légales obligatoires, nommer les dirigeants, immatriculer la société au registre des commerces et des sociétés, etc. Dans le cas de création d’une succursale, le formalisme sera allégé. Il faudra alors choisir un responsable placé à la tête de la succursale, trouver un local, immatriculer la succursale au RCS afin d’obtenir un nouvel extrait KBIS mentionnant l’existence de cette succursale. Il n’est donc pas nécessaire de faire un apport au capital social de la succursale qui n’en détient pas, ni de rédiger de nouveaux statuts et autres formalités énoncées précédemment.
La succursale étant plus facilement à portée de main, cette dernière peut être vue comme un tremplin vers la création d’une filiale, comme un moyen à des fins de prospection de connaitre davantage le lieu et le marché où la filiale pourra être implantée. Il sera plus facile alors à l’établissement principal d’aider sa succursale par la mise à disposition de moyens et vice et versa sans que l’intérêt propre de chaque entité ne soit analysé la succursale étant le prolongement d’une même société. Dans le cadre d’une succursale créée à l’étranger, cette dernière pourra être le moyen de connaitre davantage le pays avant de prendre la décision d’y installer une filiale. Il sera peut-être plus intéressant d’y installer par la suite une filiale qui détiendra la nationalité du pays d’accueil afin de se lier davantage économiquement avec la population locale et pouvoir bénéficier à terme d’un savoir-faire et de compétences locales. Cela sera également l’occasion de bénéficier d’un coût de main d’œuvre moins élevés.
De plus, une filiale étant une société distincte, la société mère détient une protection contre les dettes de sa filiale qui reste engagée vis-à-vis des tiers. A l’inverse, l’établissement principal reste tenu responsable des difficultés de sa succursale qui n’a alors pas de patrimoine propre mais dont les résultats d’exploitation et donc les dettes, sont rattachés à ceux de l’établissement principal. N’ayant pas de représentation légale propre, une succursale agit au nom et pour le compte de la société dont elle dépend pleinement. Ces propos sont encore une fois à nuancer. En effet, dans le cadre du régime mère fille, il est déjà arrivé qu’une société mère soit tenue responsable des dettes de sa fille notamment dans le cas d’une réelle immixtion constatée instaurant une apparence trompeuse et créant une croyance légitime du créancier (4). A travers la création d’une filiale, il est donc intéressant de se lancer dans une nouvelle activité, prendre plus de risques en opérant dans un domaine d’activité différent ou étendu de celui de la société mère. La succursale quant à elle n’ayant pas de statuts et donc pas d’objet social propre, l’activité exercée ne peut être différente de celle de l’établissement principal.
Le choix entre une filiale et une succursale peut également être analysé brièvement sur le plan fiscal. En effet, fiscalement, la succursale étant intégralement rattachée à sa société et la filiale étant assujettie à son propre régime d’imposition et à la TVA, il est alors intéressant de choisir un pays où la fiscalité est avantageuse. Cependant, il faudra rester vigilant face à une possible double imposition des résultats d’une succursale selon la définition donnée à cet établissement secondaire dans le pays où elle est implantée et selon les conventions fiscales en vigueur. Le montage mère fille permettra également l’application d’avantages fiscaux tels que le régime mère-fille ou le régime de l’intégration fiscale.
Pour conclure, sur ce sujet, les objectifs à long terme sont à prendre en compte lors du choix entre une succursale ou une filiale. Si l’objectif principal est le développement d’une ou plusieurs activités par le biais d’une société autonome la filiale peut être envisagée. Au contraire, si le projet n’est autre que l’expansion d’une activité déjà existante dans un lieu différent, la succursale reste un choix possible avant d’opter pour une filiale.