Les sociétés civiles d’attribution occupent une place singulière dans le paysage juridique, définies par leur vocation à la construction ou à l’acquisition d’immeubles en vue de leur division entre associés. Leur fonctionnement repose sur un ensemble de dispositions juridiques minutieusement définies, encadrant aussi bien leur création que la gestion des droits et obligations de leurs membres. Cet article se propose d’apporter un éclairage approfondi sur ces aspects, en examinant en détail les dispositions juridiques générales qui régissent ces entités, ainsi que les droits et obligations des associés au sein de ces sociétés.
A. Disposition juridiques générales
Selon l’article L212-1 du code de la construction et de l’habitation, les sociétés civiles d’attribution sont des sociétés ayant pour objet la construction ou l’acquisition d’immeubles en vue de leur division par fractions destinées à être attribuées aux associés en propriété ou en jouissance. Elles peuvent être valablement constituées sous les différentes formes prévues par la loi, même si elles n’ont pas pour but de partager un bénéfice. L’objet de ces sociétés comprend la gestion et l’entretien des immeubles jusqu’à la mise en place d’une organisation différente. Cet objet social afférent à la notion d’attribution est non exclusif pour ce type de société contrairement aux sociétés d’attribution en jouissance d’immeubles à temps partagé qui ont l’attribution comme objet exclusif. Etant une société civile, elle est soumise aux dispositions du code civil à savoir les article 1832 et suivants et bénéficient du régime de transparence fiscal prévu par l’article 1655 ter du CGI.
La notion d’attribution implique alors le fait que chaque associé ne doit pas être lésé dans ce qui lui revient de droit. Ainsi, outre l’application des dispositions du code civil, l’article L212-2 du code de la construction prévoit l’obligation d’un état descriptif de divisions en la forme authentique rappelant la répartition de chaque lot de l’immeuble social. Est également imposé la rédaction d’un règlement de jouissance afin de régler toute question liée à la gestion, à l’entretien et à la jouissance de l’immeuble.
En application de l’article L241-3 du code de la construction et de l’habitation, la gestion de la société civile d’attribution est confiée à un gérant n’ayant fait l’objet ni d’une incapacité à exercer une profession commerciale ni d’une condamnation pénale. Ce dernier ayant vocation à engager la société, ces prérequis sont indispensables.
Aucun capital social minimum n’est requis. Les associés pourraient très bien acquérir cette qualité en apportant seulement un euro symbolique à la société. Cependant, les parts sociales détenues par les associés étant proportionnelles à la valeur des lots auxquelles elles donnent vocation, le capital social doit alors nécessairement être élevé et correspondre à la valeur de l’ensemble de la construction ou de l’acquisition immobilière.
Concernant le vote des associés en assemblée générale, un consensus unanime est requis sauf dispositions contraires prévues notamment lors de la vente forcée des droits sociaux appartenant à l’associé défaillant ou lors de la dissolution de la société. Le vote lié à la gestion du bien et plus spécifiquement ses dépenses, est quant à lui réservé exclusivement aux associés qui assument ces frais.
Enfin, en application de l’article L212-9 du code de la construction et de l’habitation, en plus des motifs de dissolution de droit commun, et de ceux spécifiques aux sociétés civiles, il est possible de mettre fin à une société civile d’attribution par la décision des associés représentant au moins les deux tiers des voix et des associés. La dissolution nécessite un partage qui comprend la distribution des lots détenus et la répartition des dettes conformément aux dispositions des statuts et de l’état descriptif de division. Le partage est alors défini sous la forme d’un acte notarié par le liquidateur.
Quant est-il alors du statut des associés et plus particulièrement leurs droits au sein de cette société ?
B. Droits et obligations des associés des sociétés civiles d’attribution
Conformément à l’article L212-4 du code de la construction et de l’habitation, chaque associé respectant les obligations auxquelles il est tenu envers la société peut jouir de la fraction de l’immeuble à laquelle il a vocation, se maintenir dans cette jouissance et même obtenir l’attribution en propriété de ladite fraction.
Comme obligation afférant à l’associé, on retrouve celle de répondre positivement en cas d’appel de fonds nécessaires pour l’acquisition, la construction ou l’aménagement de l’immeuble ou en cas de carence d’un associé et ce proportionnellement aux parts détenues dans le capital social conformément à l’article L202-4 du code de la construction et de l’habitation. Si cette obligation n’est pas respectée, l’associé ne pourra se prévaloir des droits cités précédemment.
Similairement aux sociétés construction vente, l’associé défaillant pourra voir ses droits sociaux mis en vente publiquement un mois après une sommation de payer restée sans effet sur autorisation de l’assemblée générale prise à la majorité des deux tiers des droits sociaux et, sur deuxième convocation, à la majorité des deux tiers des droits sociaux dont les titulaires sont présents ou représentés.
Indépendamment de toute clause contraire dans les statuts, les parts ou actions détenues par les associés pour lesquels la mise en vente est à l’ordre du jour de l’assemblée ne sont pas considérées dans le calcul des majorités nécessaires. Afin de protéger tout associé non professionnel, la souscription de parts sociales est soumise à un délai de rétractation de 10 jours à compter du lendemain de la lettre notifiant la souscription. Face à cette obligation de répondre aux différents appels de fond, il serait alors intéressant en amont d’établir un plan de financement afin de tenir compte des possibles dépenses imprévues.
Bien que les associés disposent d’un droit de jouissance, n’étant pas propriétaires ces dernières ne peuvent empêcher la saisi du bien faite à l’initiative d’un créancier de la société. La responsabilité des associés est alors illimitée proportionnellement à leur participation au capital une fois que la société a été considérée comme incapable de régler ses dettes. Les associés auront alors le droit de devenir propriétaires s’ils ont respecté leurs devoirs envers la société notamment la participation à tout appel de fonds et ce dans deux cas précis : lors de la dissolution de la société ou lors du retrait anticipé d’un associé.
D’autre part, comme seconde obligation, il est requis que les associés contribuent aux charges de gestion de l’immeuble. Dans ce cas, un règlement de jouissance est nécessaire afin de délimiter les contributions respectives de chacun et éviter tout conflit.
En conclusion, les sociétés civiles d’attribution présentent un cadre juridique minutieusement structuré. Définies par leur objectif de partager la propriété ou la jouissance d’immeubles entre associés, ces entités se distinguent par une flexibilité du capital social, mais aussi par des obligations strictes. La nomination d’un gérant conforme à des critères rigoureux, la nécessité d’un état descriptif de divisions, et les règles entourant les droits et obligations des associés sont autant d’éléments cruciaux. La conformité aux dispositions légales apparaît ainsi comme un impératif pour assurer la stabilité et le bon fonctionnement de ces structures.