Les rémunérations provenant des professions indépendantes sont en principe soumises à l’imposition dans l’État où les prestations de services sont exercées.
Toutefois, cette règle est sujette à des critères conventionnels déterminant la répartition des droits d’imposer. Dans la mesure où ces critères peuvent avoir un impact significatif sur la fiscalité des professionnels indépendants exerçant dans un contexte international, la maîtrise de ces critères revêt un caractère essentiel.
La jurisprudence a rendu de nombreuses décisions en la matière, illustrant l’application des principes issus des conventions fiscales conclues par la France, afin d’éliminer la double imposition.
I) Critères issus des conventions fiscales répartissant les droits d’imposer
La plupart des conventions fiscales reposent sur la notion de « base fixe » ou d’une expression voisine. A titre d’exemple, nous pouvons citer l’article 14.1 de la convention fiscale entre la France et l’Autriche. Le concept de base fixe est identique à celui d’établissement stable utilisé pour les activités industrielles et commerciales des prestataires.
Bien que les conventions fiscales n’offrent pas de définition explicite de cette expression, il est communément admis que la notion de base fixe implique une stabilité, une régularité et une permanence. Fondamentalement, il s’agit d’un local aménagé spécifiquement pour l’exercice d’une profession, et l’emploi de personnel n’est pas nécessaire pour la qualifier en tant que telle.
Selon le Conseil d’Etat (CE 30/03/2005 n°230053, 10ème et 9ème sous sections, min. c/Villatte), un avocat fiscalement domicilié au Royaume Uni et inscrit aux barreaux de Londres et de Paris est considéré comme ayant une base fixe en France s’il dispose d’un bureau dédié à recevoir des clients et détient un compte bancaire domicilié à l’adresse de ce bureau. Aussi, une partie de ses honoraires provenant de son activité professionnelle exercée en France était versée sur ce compte bancaire.
Certaines conventions fiscales prennent appui sur le critère de la base fixe, mais également sur d’autres paramètres :
- Séjour pendant une période ou des périodes d’une durée totale de cent quatre-vingt-trois jours au moins au titre d’une année fiscale ;
- Rémunération supérieure ou égale à un certain montant défini.
II) Modalités d’imposition des revenus
L’Etat de situation d’une base fixe dispose du droit d’imposer les revenus rattachables à l’activité exercée. Cependant, les conventions fiscales ne donnent pas de détail quant aux modalités d’imposition.
Selon le comité des affaires fiscales de l’OCDE, si la convention fiscale recourt au critère de la base fixe, il convient d’appliquer les règles concernant l’établissement stable, revenant à :
- Ventiler les revenus du contribuable entre l’Etat de résidence et l’Etat ou est situé la base fixe, ,
- N’imposer que les revenus effectivement imputables à la base fixe sauf exception, mais en rattachant à la base fixe les revenus passifs (dividendes, intérêts, redevances) qui lui sont attribuables ;
- Ne pas traiter la base fixe d’une manière moins favorable que s’il s’agissait de l’installation d’un résident, en vertu du principe de non-discrimination.
Afin d’éliminer les doubles impositions, les méthodes sont en pratique regroupées autour de deux notions : la méthode de l’imputation (autorisant les deux Etats à percevoir un impôt mais en permettant de déduire un crédit d’impôt) et la méthode de l’exonération (octroyant à un seul Etat le droit d’imposer le revenu). En principe, dans les conventions fiscales signées par la France, la méthode de l’exonération est retenue.
Les conventions fiscales, en définissant les critères d’attribution des droits d’imposer, représentent un élément central. Cependant, il convient de souligner que les modalités d’imposition peuvent varier d’un Etat à l’autre, chaque État appliquant ses propres règles de droit interne.