L’application du droit de préemption dans le cadre de la cession de droit indivis

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L’indivision, généralement rencontrée dans le cadre de la gestion patrimoniale ou successorale, est une situation juridique où plusieurs personnes détiennent ensemble la propriété d’un même bien sans le diviser en parts distinctes. Au sein de cette indivision, chaque indivisaire possède des droits indivis sur le bien.  

Ces droits indivis peuvent être cédés, que ce soit dans leur totalité ou en partie. Cependant, lorsqu’une cession à titre onéreux est envisagée à un tiers, des règles strictes, notamment le droit de préemption, s’applique pour encadrer cette transaction. 

 

I) Règles relatives à la notification du projet de cession aux coindivisaires 

 

Chaque indivisaire a le droit de transmettre à un autre indivisaire ou à un tiers tout ou partie de ses droits indivis. Le cessionnaire des droits indivis devient titulaire de tous les droits et obligations du cédant, prenant sa place au sein de l’indivision. 

Conformément aux dispositions de l’article 815-14 du Code civil, en cas de cession à titre onéreux de droits indivis à un tiers, les coïndivisaires bénéficient d’un droit de préemption. Par conséquent, l’indivisaire qui entend céder ses droits indivis à une personne étrangère à l’indivision est tenu de notifier son intention aux autres indivisaires par acte extrajudiciaire. 

Dans le cas d’un démembrement de propriété, une notification est requise à l’attention de tout nu-propriétaire et de tout usufruitier (815-18 alinéa 2 du Code civil). Cependant, un nu-propriétaire ne peut acquérir une part en usufruit que si aucun usufruitier ne se porte acquéreur ; de même, un usufruitier ne peut acquérir une part en nue-propriété que si aucun nu-propriétaire ne préempte. 

Cette notification doit comporter les détails relatifs : 

  • Au prix ; 
  • Aux conditions relatives à la cession ; 
  • Aux nom, domicile, profession du cessionnaire. 

Le défaut de notification préalable du projet de cession aux coïndivisaires ou une notification incomplète ou irrégulière entraînent la nullité de la cession. Seuls les coïndivisaires ou leurs héritiers peuvent engager une action en nullité, laquelle est soumise à une prescription quinquennale (article 815-16 du Code civil).  

 

II) Règles relatives aux modalités d’exercice du droit de préemption 

 

Avertis par acte extrajudiciaire à l’initiative du cédant de son intention de céder et des conditions de la cession, les coïndivisaires bénéficient d’un délai d’un mois pour notifier, également par acte extrajudiciaire, leur décision de préempter aux prix et conditions indiqués. La vente doit être conclue dans les deux mois ; au-delà de ce délai, la déclaration de préemption est nulle de plein droit 15 jours après une mise en demeure infructueuse (article 815-14 alinéa 3 du Code civil). 

L’indivisaire qui choisit de préempter se substitue entièrement au cessionnaire initial dans tous ses droits et obligations (Cass. 1e civ. 26-3-1996 n° 93-17.574). Il ne peut remettre en question ni le prix ni les conditions stipulées. Le cas échéant, il bénéficie des conditions suspensives prévues dans l’offre 

En cas de préemption simultanée par plusieurs indivisaires, sauf accord contraire, ils sont réputés acquérir la part mise en vente proportionnellement à leurs droits respectifs dans l’indivision (article 815-14 alinéa 4 du Code civil). 

 

La notification du projet de cession aux coindivisaires et l’exercice du droit de préemption sont intégrées dans le processus de cession de droits indivis. Il est important de souligner que la notification du projet de cession ne constitue pas une offre de vente et ne suffit pas à former le contrat de cession. 

 ECP

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