Certaines formes de donations, bien qu’échappant au formalisme imposé par l’article 931 du Code civil et à l’exigence d’un acte authentique, n’en restent pas moins soumises à des règles spécifiques.
Parmi elles figurent les dons manuels, les donations déguisées et les donations indirectes. Contrairement au don manuel, la donation indirecte résulte nécessairement d’un acte juridique mais non nécessairement explicite quant à l’intention libérale, ce qui peut rendre sa qualification plus complexe.
I. Régime juridique et conditions de validité de la donation indirecte
La donation indirecte, validée par la jurisprudence, désigne une convention qui, sans simulation, revêt accessoirement le caractère d’une libéralité. Elle repose sur un acte juridique sincère et réel mais dans lequel l’intention libérale n’est ni dissimulée ni expressément exprimée.
La donation indirecte peut s’opérer à travers :
- un acte à titre onéreux, par exemple une vente consentie pour un prix volontairement minoré ;
- un acte neutre n’indiquant pas clairement sa nature onéreuse ou gratuite ;
- une renonciation à un droit dans le but de procurer un avantage à un tiers.
La donation indirecte doit respecter à la fois les conditions de validité de l’acte sur lequel elle repose (un acte authentique ou un acte sous signature privée) et celles tirées du droit commun des donations entre vifs (notamment un dessaisissement irrévocable du donateur, une intention libérale, et l’acceptation du donataire).
Pour qu’un acte soit qualifié de donation indirecte, deux éléments doivent être prouvés simultanément :
- l’avantage résultant de l’acte pour le donataire ;
- l’intention libérale du donateur.
À cet égard, la Cour de cassation (Cass. 1e civ. 6-3-2024 n° 22-14.745) a rappelé que l’absence de preuve de l’intention libérale prive l’acte de la qualification de donation indirecte.
Une fois la qualification établie, la donation indirecte est soumise au régime juridique des donations, entraînant des conséquences civiles et fiscales.
II. Régime fiscal de la donation indirecte : application des droits de mutation à titre gratuit
Les donations indirectes, en raison de leur caractère non ostensible, échappent le plus souvent à la taxation immédiate aux droits de donation au moment de leur réalisation. Cependant, à la différence des dons manuels, elles sont par nature taxables et les droits de mutation deviennent exigibles :
- Soit lorsque l’administration fiscale parvient à démontrer l’existence de la libéralité, notamment en établissant l’intention libérale et l’avantage octroyé au donataire.
- Soit par application de la règle du rappel fiscal dans le cadre d’une nouvelle donation effectuée par le donateur ou lors du décès de ce dernier.
Aussi, lorsque la donation indirecte est consentie par une personne morale, la donation demeure taxable. Par conséquent, une vente à prix minoré réalisée par une personne morale au profit de son dirigeant est considérée comme taxable au titre des droits de mutation à titre gratuit.
Parmi les actes susceptibles d’être qualifiés en donations indirectes, figurent notamment la renonciation à un usufruit en faveur des nus-propriétaires, les prêts suivis d’une remise de dette lorsque l’intention libérale est prouvée.
Toutefois, certains actes échappent à cette qualification, notamment en l’absence d’intention libérale et d’appauvrissement du donateur, tels que la mise en réserve des bénéfices sociaux par un usufruitier, la décision collective par assemblée générale des associés modifiant la répartition des dividendes.
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Il est important de distinguer les donations indirectes des donations déguisées, ces dernières étant caractérisées par une dissimulation ou le caractère fictif de l’acte.